Le cross-country de retour aux Jeux Olympiques ?

En cette période de Jeux Olympiques d’hiver, certains passionnés d’athlétisme fantasment sur un possible retour du cross-country au programme olympique. C’est en tout cas la demande qu’avait formulée conjointement en 2008 les légendes Haile Gebresselassie, Kenenisa Bekele et Paul Tergat. A eux trois, ces coureurs des hauts plateaux ont remporté pas moins de 5 titres olympiques, 16 titres mondiaux en cross-country et battu des records du monde du 5000m au marathon.

Dans une lettre ouverte adressée au président du Comité International Olympiques Jacques Rogge et au président de l’IAAF Lamine Diack, ces trois grands champions souhaitent un retour du cross-country après sa disparition du programme olympique après les Jeux Olympiques Paris en 1924 qui virent la victoire de Paavo Nurmi. Cette année-là 23 athlètes sur 38 abandonnèrent à cause de conditions climatiques particulièrement chaudes et des fumées toxiques émanant d’industries voisines.

Les trois fondeurs demandent un retour du cross-country que ce soit aux jeux olympiques d’hiver ou aux jeux olympiques d’été. La demande a été appuyée par l’IAAF, consciente des retombées que cela pourrait avoir pour l’athlétisme. En effet, en cas d’entrée du cross-country aux Jeux d’hiver, l’athlétisme serait le seul sport présent à la fois lors des jeux olympiques estivaux et hivernaux.

Une vraie chance pour le continent africain

Depuis 2011, les championnats du monde de cross-country ne sont disputés que lors des années impaires, puisque l’IAAF a décidé d’organiser cet évènement plus qu’une seule fois tous les deux ans. Faut-il y voir un signe supplémentaire ? Cela pourrait laisser la place à l’ajout d’une épreuve olympique puisque les Jeux Olympiques, d’été et d’hiver, se déroulent les années paires.

Le cross-country aux JO d’été ajouterait une distance olympique pour les fondeurs entre le 10 000m et le marathon. Cela ne serait peut-être pas révolutionnaire pour le grand public car il existe déjà 47 épreuves olympiques en athlétisme. Mais une apparition aux JO d’hiver permettrait une présence et une vraie chance de médailles pour le continent africain, ce qui pourrait attirer l’intérêt d’un plus large public pour les Jeux d’hiver. Ainsi à Sotchi, seuls le Maroc, le Togo et le Zimbabwe sont représentés. De plus, on sait que la ville hôte n’est pas toujours enneigée. Lors des deux derniers Jeux Olympiques d’hiver, les villes de Vancouver et de Sotchi se situent même au niveau de la mer. Un terrain de cross gelé et enneigé ou alors un terrain plus sec pourraient être disponibles.

Un spectacle unique

Cependant le règlement officiel du CIO stipule que les sports olympiques d’hiver doivent se tenir sur glace ou sur neige et c’est pourquoi le CIO a une première fois rejeté la requête. Les discussions reprendront certainement après les Jeux de Sotchi. Le cross-country devra donc pour faire son apparition aux Jeux d’hiver se dérouler sur un sol enneigé ou « glacé ». A titre d’exemple le patinage artistique, sport typiquement considéré comme sport d’hiver, était présent aux Jeux olympiques de Londres en 1908 et d’Anvers en 1920 (avec également le hockey sur glace), avant qu’apparaissent les Jeux d’hiver en 1924 à Chamonix.

Si vous avez déjà eu l’occasion de courir sur la neige que ce soit à l’entraînement ou en compétition, vous aurez certainement ressenti un certain plaisir ! Cela pourrait être très spectaculaire, et même redistribuer les cartes… Les athlètes des hauts plateaux comme on les appelle sont habitués à des températures plutôt tempérées mais moins au froid que l’on peut trouver lors des Jeux d’hiver. Au-delà de la fraicheur du thermomètre, un sol glacé diffère fortement de la boue, ce qui modifie la foulée des athlètes et pourrait apporter son lot de surprises.

Le cross international d’Edimbourg est souvent couru dans des conditions enneigées, comme en janvier 2010 où le Kenyan Joseph Ebuya et l’Ethiopienne Tirunesh Dibaba l’avaient emporté. Les championnats du monde de Boston en 1992 couru sur un sol enneigé avaient également offert un magnifique spectacle où la France était revenue avec la médaille d’argent par équipe chez les hommes.

Pour point de comparaison une course équestre sur neige se déroule à St-Moritz chaque hiver depuis 1907. La White Turf, qui rassemble plus de 30 000 spectateurs, se dispute sur un lac gelé d’une épaisseur d’environ 60cm sur lequel on superpose une quinzaine de centimètres de neige.

A défaut d’être un spectacle hippique, le cross-country aux Jeux d’hiver se pourrait bien être un véritable spectacle épique…

 

La lettre ouverte en question (en anglais)


President of the IOC, Mr. Jacques Rogge and president of the IAAF, Mr. Lamine Diack

We the undersigned global champions and record breakers would like to invite your two highly esteemed federations to consider the re-introduction of cross country running into the Olympic Games programme, either as a summer or a winter sport.
Cross country running is of course the most natural, indeed elemental of all sports. It is a fascinating discipline whose roots are lost in the earliest history of mankind.
In the 1924 Olympic Games in Paris, cross country running was so far seen for the last time with the victory of one of the greatest ever Olympians, Finland’s Paavo Nurmi.
The official report at the time noted that a combination of unseasonal hot weather and the effects of the heat of a near-by industrial chimney – yes we had global warming in those days too! – meant that the air temperature on the course was as high as 36 degrees Centigrade (96.8 Fahrenheit). As such, of the 38 starts, 23 failed to finish. The problems of 1924 were certainly unique.
So we humbly and respectfully ask, what is your opinion about returning cross country running to a future Olympic Games, either on the programme of a summer or winter celebration?
We think it would be wonderful to give the worlds best cross country runners the chance to compete in the greatest of all sporting festivals, and are hopeful of a positive response.

Yours in sport,

Haile Gebrselassie, Kenenisa Bekele, Paul Tergat