La splendide résurrection de Clémence Tavernier

Mission largement accomplie pour Clémence Tavernier et Sylvain Ponsin, les deux sociétaires de l’Union Sportive Oyonnax (USO), qui disposaient des meilleures côtes chez les athlètes départementaux. Pour la première, le scénario était pourtant loin d’être ficelé d’avance, tant elle aura accumulé les coups du sort depuis deux ans.

Sur le parcours dévolu aux cadets (5280m), Sylvain Ponsin, 17 ans, s’adjugeait une très méritoire 16ème place au milieu d’un peloton fort de 336 crossmen. Quarante-et-une secondes le séparaient seulement du leader Maxime Hueber Moosbrugger.

Mais c’est bien sur le cross court féminin (3070m) où surgit le plus éblouissant fait d’armes, Clémence Tavernier, 21 ans à compter du 27 février dernier, parvenant à accrocher une magnifique 13ème position, synonyme de 10ème rang chez les Françaises sur un total de 214 filles classées. Cerise sur le gâteau, elle endossait la tenue de dauphine dans sa catégorie espoir qui hélas n’est pas récompensée officiellement sur cette distance.

Somme toute, une performance en corrélation avec son but initial, au regard notamment de ses deux ultimes années de disette qui lui interdisaient bien sûr tout espoir de podium. Ce n’est en effet qu’en septembre dernier qu’elle reprenait sérieusement l’entraînement sous l’égide du Francilien Jean-Baptiste Congourdeau, âgé de 37 ans, dont la réputation n’est plus à établir dans le demi-fond et le sprint, ayant déjà coaché plusieurs internationaux hexagonaux et étrangers.

Clémence Tavernier sur la courte distance des Championnats de France de cross-country, le 4 mars 2012 à la Roche-sur-Yon. Elle s’y adjugera une très belle 13ème place au scratch, soit la 10ème chez les Françaises et la seconde en espoir. Cliché de l’Union Sportive Oyonnax.

Affutée comme une lame

Après sa chevauchée, elle se déclarait ravie de sa prestation : « J’ai ressenti d’excellentes sensations, illustrées par la stabilité des écarts avec mes émules par rapport aux épreuves qualificatives qui furent à mon avantage, en particulier avec la lauréate Claire Navez et la 4ème, l’Allemande Felicitas Mensing, absolument survoltée sur l’hippodrome des Terres Noires. » Sa course aura été extrêmement régulière et limpide, demeurant à peu près à la même place, des prémices à l’épilogue. Après une excellente entrée en la matière (une de ses traditionnelles cartes maîtresses), où sa puissance (1m74 et excédant les 60kg) lui permettait de jouer opportunément des coudes, elle terminait en trombe, grillant au passage la politesse à une de ses rivales dans la dernière ligne droite.

Dans le train qui la ramenait à Paris où elle poursuit en deuxième année des études de podologie, l’égérie de l’USO était parfaitement consciente d’être revenu du diable vauvert.

Petit retour en arrière, le 14 février 2010 précisément, lors du Meeting national de Metz indoor où elle visait sur le 1500m, sa discipline de prédilection, le record de France junior, le précédent en 4’28’’03 remontant à dix-huit ans. Hélas, l’échauffement allait lui être fatal, ressentant une vive douleur au pied. Le verdict de l’IRM fut sans appel : la Haut-Bugiste  souffrit d’une fracture de fatigue, consécutive à un surentraînement qui se traduisait par un excès de stages, entre autres celui de quinze jours écoulé au Portugal début janvier et réservé aux espoirs nationaux du demi-fond.

 

Redoutable adversité

Adieux veaux, vaches et cochons ! S’envolait effectivement le titre de championne de France junior de cross qui lui était promis, vu sa forme étincelante du moment (1ère aux Régionaux), sans oublier son palmarès déjà éloquent sur terrain gras : 11ème aux France et 24ème aux Europe en 2009 après avoir été victorieuse chez les cadettes en 2008. Tombaient pareillement à la trappe les Mondiaux de cross en Pologne du 28 mars, enfin les Championnats du monde du 1500m au Canada du 20 au 25 juillet.

Mais le pis était à venir. Renouant avec la compétition le 5 juin 2010 à l’occasion du Meeting national de Valbonne, l’ambassadrice de la capitale de la Plastics Vallée finissait 3ème avec un excellent chrono de 2’13’’26. La joie allait cependant être de courte durée. Peu après, elle se blessa en effet une seconde fois, contractant alors une invalidante tendinite à la hanche.

Désabusée, elle remisa définitivement ses baskets pour entamer une interminable traversée du désert. Parallèlement, elle se trouva quelque peu déstabilisée dans sa nouvelle et trépidante vie parisienne, rendue nécessaire par son cursus podologique amorcé en septembre 2010. Il lui aura fallu au plus vite chasser la vague à l’âme engendrée par l’éloignement de ses proches et  de sa province natale qu’elle chérit tant. Enfin, comble de l’infortune, le surpoids engrangé  acheva de la miner.

Avant d’être prise en mains par Congourdeau, c’est Jean Violy, 75 ans, son tout premier coach en 2005, qui l’extirpera de l’ornière durant l’été 2011, échafaudant des plans pour une reprise en douceur.

Après les cross FFA qui auront relancé sa carrière, elle s’est recentrée aussitôt sur ses distances favorites que sont les 800 et 1500m qu’elle escompte bien alterner. Dès le week-end  prochain, elle sera à Nogent-sur-Oise pour concourir le 800m des Championnats de France en salle.

Cette année, elle cherchera en réalité à égaler son niveau qui était le sien en 2008-2009 avant d’afficher pour 2013 des objectifs plus ambitieux. Avec son tempérament de feu, une revanche à prendre sur le destin qui ne l’aura guère épargnée, la volonté également de s’amincir, enfin bénéficiant d’un formateur de qualité, Clémence Tavernier a tous les atouts en main pour réapparaître sur le devant de la scène, durablement cette fois-ci.  

Pour le compte du « Dauphiné Libéré », édition Bellegarde – Pays-de-Gex, en date du mardi 6 mars 2012.